Amnistie internationale : Une lumière contre les ténèbres
Peter Benenson (1921-2005) lors du 20e anniversaire d'Amnistie internationale, en mai 1981
Photo : Raoul Shade
Nous sommes en 1961. Dans un café de Lisbonne, deux étudiants portent un toast à la liberté. Ça ne se fait pas dans le Portugal du dictateur Salazar. Ils sont arrêtés et condamnés à sept ans d’emprisonnement. Peter Benenson, avocat britannique, est scandalisé par cette nouvelle. En mai 1961, il publie dans l’hebdomadaire The Observer un appel à l’action intitulé The Forgotten Prisoners.
L’article commence ainsi: « Ouvrez votre journal – n’importe quel jour de la semaine – et vous trouverez un reportage d’un coin ou l’autre de la planète, sur quelqu’un emprisonné, torturé ou exécuté, parce que ses opinions ou sa religion sont inacceptables pour son gouvernement. Le lecteur de journaux éprouve un affreux sentiment d’impuissance. Cependant, si ces sentiments de dégoût du monde entier pouvaient être réunis dans une action commune, quelque chose pourrait être fait. » Repris dans de nombreux journaux un peu partout à l’étranger, son cri du cœur rejoint les aspirations et les valeurs de milliers de personnes.
Dès le mois de juillet, une première rencontre internationale rassemble des délégués d’Allemagne, de Belgique, des États-Unis, de France, d’Irlande, du Royaume-Uni et de Suisse. Ils décident de fonder un « mouvement international permanent pour la défense de la liberté d’opinion et de religion ». Amnistie internationale est née.
Luttes et hauts faits
En 1962, Amnistie internationale publie son premier rapport annuel qui évoque les 210 prisonniers déjà adoptés par 70 groupes dans sept pays. Ça ne s’est jamais arrêté. On ne compte plus les luttes que l’organisation a menées et mène sans relâche : libération de prisonniers politiques, campagnes pour l’abolition de la torture, campagnes pour l’abolition de la peine de mort, droits et protection des réfugiés. Elle se mobilise pour la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre la torture que l’ONU adopte à l’unanimité en 1975. En 1977, elle reçoit le prix Nobel de la paix pour « avoir contribué à garantir les bases de la liberté et de la justice, et avoir ainsi contribué à la paix dans le monde ».
La mission de l’organisation a évolué. Limité à l’origine aux prisonniers d’opinion, son champ d’intervention s’est considérablement élargi. En 1985, elle ajoute à son mandat le travail en faveur des réfugiés. En 2000, sa troisième campagne contre la peine de mort, qui est sa première campagne en ligne, lui vaut le Revolution Award de 2001 pour la « meilleure utilisation du courrier électronique ». Depuis 2001, le mandat d’Amnistie internationale inclut la conduite d’actions dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels.
Les campagnes d’Amnistie ont sauvé d’innombrables prisonniers de la torture et de la mort. De l’Afrique du Sud à la Syrie en passant par l’Ouganda, l’Irak, la Birmanie, la Chine, Guantánamo, la Tchétchénie, l’Égypte, le Darfour, etc., son action a contribué à la libération de prisonniers politiques et mis en lumière les violations des droits humains.
En ce moment, c’est l’Arabie saoudite qui est dans sa mire. En mai 2018, Loujain al Hathloul, Iman al Nafjan et Aziza al Yousef, défenseures des droits humains militant pour qu’on mette fin au système répressif de tutelle masculine, ont été emprisonnées. Elles risquent jusqu’à vingt ans de prison. Cruelle ironie, elles ont été arrêtées un mois avant la mise en oeuvre du décret permettant enfin aux femmes de conduire, droit pour lequel elles se sont battues pendant plusieurs années.
Amnistie est partout, et aussi chez nous. Lors du remaniement ministériel du 18 juillet 2018, Bill Blair est devenu ministre de la Sécurité frontalière et de la Réduction du crime organisé. Amnistie internationale est parmi les signataires d’une lettre ouverte qui se sont inquiétés de l’appellation de ce nouveau ministère et ont demandé pourquoi confier à un même ministre des responsabilités liées aux migrations irrégulières et à la réduction de la criminalité.
Qui finance tout ça ?
Amnistie internationale compte plus de 3 millions de membres et sympathisants actifs dans plus de 150 pays. L’organisation ne reçoit aucune aide gouvernementale. Les dons d’individus et les cotisations de membres représentent 90 % de ses revenus. La moitié de son budget provient de donateurs mensuels, ce qui lui assure une certaine stabilité.
Le logo de l’organisation, une bougie entourée de fil de fer barbelé, est devenu un symbole mondial d’espoir. Il rappelle cette phrase du sage chinois Lao-Tseu (601 av. J.-C.) : « Mieux vaut allumer une bougie que maudire les ténèbres ». Un don à Amnistie internationale, en temps ou en argent, c’est une façon d’allumer une bougie.
Amnisitie internationale en Saskatchewan : amnestysaskatchewan.ca
Pétition en faveur des femmes défenseures des droits humains emprisonnées en Arabie saoudite : https://agir.amnistie.ca/page/36085/petition/1?chain
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