Les éditeurs franco-canadiens ont su tirer profit de la pandémie
Crédit : Courtoisie du REFC
Les ventes de livres d’éditeurs québécois et franco-canadiens ont augmenté de 18,3 % en 2021 comparativement à 2020, a révélé en janvier la Société de gestion de la Banque de titres de langue française.
Si les maisons d’édition du Regroupement des éditeurs franco-canadiens (REFC) rapportent plutôt une augmentation de 5 à 10 %, il n’en demeure pas moins qu’elles ont réussi à se garder la tête hors de l’eau depuis le début de la pandémie, certaines ayant même utilisé cette période pour se renouveler.
« Il faut prendre ce résultat avec un grain de sel », tempère le président du REFC, Stéphane Cormier. « Dans l’ensemble, les maisons d’édition ont quand même connu une légère augmentation des ventes en période de pandémie », se réjouit-il.
Stéphane Cormier, président du Regroupement des éditeurs franco-canadiens (REFC)
Crédit : Myriam Caron Belzile
Cette hausse n’est pas aussi élevée que celle relevée par Gaspard, le système d’information de la Société de gestion de la Banque de titres de langue française (BTLF), mais Stéphane Cormier note que l’année 2021-2022 s’annonce très bonne : « Je trouve ça réjouissant », s’enthousiasme-t-il.
Le REFC a d’ailleurs accueilli trois nouvelles maisons d’édition depuis le début de la pandémie : les éditions du Pacifique Nord-Ouest en Colombie-Britannique, Vidacom Publications au Manitoba et les Éditions Terre d’accueil dans l’Est ontarien.
« Ça démontre un souhait et un intérêt pour que des maisons d’édition s’installent dans des régions périphériques, parce qu’il y a des francophones et des gens qui ont des choses à dire, à raconter, et des gens qui ont envie de les publier », conclut Stéphane Cormier.
Le présentiel, entre espoir et incertitude
Au Manitoba, la directrice générale des Éditions du Blé, Vanessa Gaillard, observe pour sa part une hausse des ventes d’environ 7 % entre 2019 et 2021. Le nombre de publications y est demeuré stable dans les deux dernières années, variant entre six et huit.
La nouvelle directrice, qui est entrée en poste en novembre 2021, espère tout de même que l’année 2022 sera synonyme de reprise des événements en personne, l’annulation de ces derniers ou leur tenue en mode virtuel constituant l’un des plus grands défis pour les maisons d’édition.
« Festivals, salons du livre, lancements et causeries : on y fait quand même une certaine part de nos ventes, souligne Stéphane Cormier. […] En virtuel, c’est plus difficile de vendre des livres », constate-t-il.
« Les gens sont revenus aux livres »
Serge Patrice Thibodeau, poète et directeur général des Éditions Perce-Neige à Moncton.
Crédit : Sylvie Mousseau – Acadie Nouvelle
Pour le président du REFC, la légère augmentation des ventes témoigne que la perte de revenus liée à l’annulation de deux ans d’événements a été contrebalancée par des ventes supplémentaires en librairie ou en ligne.
« Sachant que c’était difficile d’aller voir un spectacle de théâtre, d’aller au cinéma ou d’aller voir un show de danse, une des activités culturelles disponibles, c’était la lecture », lance le codirecteur de la maison Prise de parole de Sudbury.
C’est également l’hypothèse de Serge Patrice Thibodeau, poète et directeur général des Éditions Perce-Neige à Moncton : « Les gens sont revenus aux livres. Ils se sont tannés des écrans […] et je pense qu’ils ont repris l’habitude d’acheter des livres et de lire, et ça ne devrait pas s’atténuer dans les années à venir. »
Si l’écriture est une activité solitaire, Stéphane Cormier note que l’isolement résultant de la pandémie a tout de même été pesant pour plusieurs auteurs : « À partir du moment où le livre est publié, tu peux voir l’impact que ça a sur les lecteurs et lectrices. Mais quand pendant deux ans tu n’as pas cette opportunité-là, ça peut être difficile. »
Ce qui manque le plus à Serge Patrice Thibodeau, ce sont les lancements-spectacles traditionnellement organisés par les Éditions Perce-Neige : « Ça fait deux ans qu’on n’a rien pu faire et ça, c’est triste […] On a quand même des idées pour retrouver notre public et en développer d’autres », assure-t-il.
La maison d’édition a fait le choix à la fin 2020 de ne plus s’investir dans les salons du livre virtuels, parce que « ça nous demandait autant de temps [que les salons du livre en personne] et ça n’avait absolument aucun impact – du moins pour nous », indique le directeur.
Rien n’égale les librairies
Quant à lui, Stéphane Cormier souligne l’importance des librairies, « une salle où les gens voient un paquet de livres en français ». Et d’ajouter : « C’est sûr qu’on peut commander des livres sur Internet facilement aujourd’hui, mais c’est une offre en anglais qu’on voit beaucoup. »
Le porte-parole des éditeurs franco-canadiens estime qu’avoir des points de vente de livres en français, comme la future librairie de la Place des Arts du Grand Sudbury, peut avoir un grand effet sur les habitudes de lecture et, ainsi, sur la pérennité des maisons d’édition de langue française.
« Entouré de livres, c’est là que tu fais des découvertes. Le simple fait de se mettre à lire, ça bénéficie à tout le monde », conclut Stéphane Cormier.
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