Une famille canadienne-française au coeur d’un roman historique
En effectuant des recherches sur les premiers occupants de sa maison à Saskatoon, l’auteure Candace Savage ne se doutait pas que l’histoire surprenante de ces derniers allait la mener à l’écriture de son tout dernier roman : Strangers in the House : A Prairie Story of Bigotry and Belonging. Retour sur une histoire aussi passionnante qu’insolite.
Candace Savage a fait l’achat de sa propriété qu’elle qualifie « d’assez modeste » à Saskatoon en 1990. Un beau jour, suite à une visite à la bibliothèque, sa fille rentre de l’école avec une liste de tous les précédents occupants. Le tout premier, qui avait bâti la demeure en 1920, se nomme Napoléon Sureau dit Blondin. « C’était curieux car c’était le seul nom francophone de la liste, tous les autres habitants avaient été anglophones », relate l’écrivaine.
Si les murs pouvaient parler…
Des années plus tard, au début des années 2000, en faisant des rénovations dans la cuisine, Candace découvre plusieurs objets dans l’un des murs : « Il y avait des photos, des recettes et une boîte de jouets avec le nom de Ralph Blondin inscrit dessus. Nous avions donc la confirmation que ces objets avaient appartenu à la famille de Napoléon. »
Cette découverte surprenante fut le début de plusieurs années de recherches et de rencontres avec des descendants de la famille Blondin. Car Candace, auteure originaire de l’Alberta, y a trouvé un cadeau inespéré pour écrire une histoire. « Je n’aurais jamais été capable d’écrire ce roman sans l’aide de tous les gens que j’ai rencontrés. Cela peut être vu comme une intrusion dans la vie privée mais ces personnes semblent tous avoir apprécié. Ça aide à comprendre leur passé et aussi ce que leurs grands-parents ont vécu en tant que francophones dans un contexte politique des années 1920 », explique-t-elle, reconnaissante.
Une époque sombre pour la francophonie
L’histoire de la famille Blondin, dépeinte dans le roman de Candace Savage Strangers in the house, témoigne de la réalité de plusieurs autres familles francophones de la même époque. Dans les années 1920, l’élite politique et sociale jugeait les francophones « indésirables ». Régnait alors une très forte influence des orangistes et du Ku Klux Klan, incitant à la haine envers ceux qui ne parlaient pas anglais.
Comme beaucoup d’autres, la famille Blondin a ainsi tenté pendant des années de dissimuler son origine, adoptant même des noms anglicisés pour se fondre dans la masse. Cet épisode de l’histoire canadienne soulevé par l’auteure trouve un écho encore aujourd’hui, alors que les francophones de l’Ouest cherchent encore à affirmer leur place sur la scène nationale.
Quand le français disparaît
Fran Zerr, descendante Blondin, est originaire de Régina où elle demeure toujours. Elle et sa sœur ont rencontré l’auteure lors du lancement de son livre le 3 octobre dernier à Saskatoon. Les deux petites-filles de Napoléon Sureau dit Blondin sont même allées visiter la maison décidément pleine d’histoire.
« C’est un tel privilège d’avoir une personne qui écrit sur sa famille. Mon père serait tellement content d’apprendre cela. C’était très difficile pour les francophones dans ce temps. On le comprend très bien dans le livre. Ma grand-mère ne voulait pas parler français, même à la maison. Ils ont donc décidé d’arrêter de parler français et de ne parler que l’anglais. Depuis ce temps, tout le monde parle l’anglais dans la famille », témoigne la descendante.
En retraçant l’histoire de la famille Blondin, le livre de Candace Savage renvoie à un âge sombre pour les francophones, parfois difficile à saisir aujourd’hui. « La meilleur façon de comprendre ce qu’ils ont vécu, c’est vraiment de lire le livre », conclut Fran.
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