La communauté francophone de Prince Albert entre défis et résilience
Au nord de la Saskatchewan, la ville de Prince Albert abrite une communauté francophone dynamique, engagée et fière de son héritage. Même s’ils font face à d’importants défis, comme l’exode de leurs jeunes, les francophones de Prince Albert continuent de faire vivre leur culture et de contribuer activement à la vie locale.
Fondée en 1862, Prince Albert est la troisième plus grande ville de la province, avec une population d’un peu moins de 40 000 habitants selon le recensement de 2021.
Avec 645 résidents ayant déclaré avoir le français comme langue maternelle, les francophones y constituent environ 1,7 % de la population, soit plus que la moyenne provinciale de 1,1 %. En incluant ceux qui parlent le français comme langue seconde, cette proportion atteint 7,3 %.
L’école Valois, seule école francophone de la ville, accueille environ 200 élèves de la prématernelle à la 12e année. Mais un nouvel établissement, très attendu, a été annoncé et pourra accueillir davantage d’élèves.
« C’est une excellente nouvelle », se réjouit Michel Dubé, député communautaire auprès de l’Assemblée communautaire fransaskoise (ACF) et membre du conseil d’administration de la Société canadienne-française de Prince Albert (SCFPA).
« La nouvelle école permettra d’éduquer nos jeunes en français et d’éviter, en partie, l’assimilation », croit le Fransaskois, ancien membre du groupe des Bons Vivants qui réunissait des aînés francophones pour organiser des activités sociales et culturelles.
Une minorité fragile
L'assimilation est l’un des enjeux majeurs de la communauté francophone et Prince Albert n’y échappe pas.
« Ces dernières années, nous avons observé une augmentation des couples exogames, le vieillissement de la population francophone et l’exode des jeunes vers d’autres régions offrant plus d’opportunités », constate Michel Dubé.
Malgré tout, de nouvelles familles issues de l’immigration ont été accueillies, « apportant de la diversité et de la richesse ».
Cette contribution devrait s’intensifier avec la récente désignation de Prince Albert comme Communauté francophone accueillante (CFA), rejoignant ainsi Gravelbourg et Moose Jaw.
Ce programme fédéral, dirigé par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC), vise à renforcer l’attractivité de la ville et à attirer des francophones dans une vingtaine de localités à travers le pays.
Dieudonné Nimubona, arrivé du Burundi il y a seize ans après un bref passage par Montréal, estime que cette désignation est importante, mais rappelle que « l’intégration dépend en grande partie de l’initiative personnelle de chacun ».
Enseignant à l’école francophone locale, il est aussi un fidèle paroissien de la cathédrale Sacré-Cœur et participe activement aux activités culturelles organisées par la SCFPA. Il affectionne particulièrement les 5 à 7, ces rencontres conviviales où les francophones se retrouvent pour discuter et partager un bon repas.
« J’ai plein d’amis francophones. Grâce à eux, j’ai découvert la culture canadienne et même regardé des matchs des Roughriders ! J’en garde de très beaux souvenirs », raconte-t-il avec émotion.
Des défis à relever
En plus de l’accueil chaleureux de ses habitants, Prince Albert bénéficie d’une situation géographique unique, entre prairies, lacs et forêts boréales, offrant un cadre naturel exceptionnel.
Cependant, tout n’est pas rose dans « la porte du nord », comme certains l’appellent parfois. La jeunesse locale, en particulier, a le regard tourné vers l’extérieur.
« L’absence de programme universitaire pousse de nombreux jeunes à partir pour leurs études. C’est aussi le cas pour l’emploi, car l’offre est plus diversifiée dans les grands centres urbains », note Michel Dubé.
Prince Albert doit également composer avec des défis sociaux majeurs comme l’itinérance, la toxicomanie et l’alcoolisme qui touchent une partie de la population.
« Malheureusement, nous sommes directement confrontés à ces problématiques dans nos locaux situés en centre-ville. Nous devons même engager un agent de sécurité lors de nos 5 à 7 pour éviter les ennuis », confie Soraya Ellert, directrice de la SCFPA.
Malgré ces obstacles, les francophones de Prince Albert restent optimistes et lancent des initiatives pour revitaliser la communauté.
En témoigne l’inauguration d’un nouveau studio audiovisuel Gaëtan Benoit, inauguré en hommage au jeune Fransaskois disparu en 2022.
Installé au sein des locaux de la SCFPA, le studio permet la production locale de contenu audio et vidéo, comme des émissions de radio, des capsules pour les réseaux sociaux, ou encore des vidéos éducatives. En seulement quelques mois, plus de 500 jeunes ont participé aux ateliers organisés sur place.
Toujours soucieuse d’assurer la relève et de desservir les familles et la jeunesse, la SCFPA organise également le camp d’été Franco Fun, un programme qui remporte un beau succès.
Chaque année, au mois de mars, la fierté francophone retentit lors d’un bruyant tintamarre dans les rues de Prince Albert. Michele Dubé adore marcher parmi les enfants en agitant le drapeau fransaskois.
« C’est une façon d’affirmer notre identité, cela nous rend sûrs de nous-mêmes et visibles. C’est une activité très positive, ça donne de l’espoir », conclut le Fransaskois résolument optimiste.
352