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Article de l'Eau vive

Leanne Tremblay
/ Catégories: Arts et culture, Arts visuels

Daphne Boyer : « On ne peut pas quitter les Prairies, elles sont toujours en nous. »

Du 8 février au 4 juin, l’exposition Of a Place à la galerie Dunlop de la bibliothèque municipale de Regina met en lumière le fort sentiment d’appartenance aux Prairies d’artistes locaux. L’une d’entre eux, la Fransaskoise Daphne Boyer, d’origine métisse, revient sur son œuvre Full Flower et son attachement aux grandes plaines.

Votre œuvre Full Flower fait désormais partie de la collection permanente de la galerie Dunlop. C’est un bel accomplissement pour vous ?  

Je reconnais que la galerie Dunlop a vraiment contribué à lancer ma carrière artistique lorsque je n’étais qu’une artiste débutante en 2020, en pleine pandémie.

Alyssa Fearon, Thomas Johnson et Wendy Peart m’ont encouragée à vraiment pousser mes limites.

Avant la pandémie, je n'ai pas vraiment travaillé sur Zoom ni avec des balados. Je trouve qu’ils m'ont fait un grand cadeau parce que je savais à quel point d’autres artistes souffraient.

Full Flower apparaît en ce moment dans l’exposition Of a Place. Qu’apporte cette œuvre selon vous ?

Cette œuvre a une histoire très bien enracinée dans la culture des plaines.

Full Flower est inspiré d’un sac à mousse préservé au musée du Manitoba. Maureen Matthews, l’ancienne conservatrice en ethnologie du musée, a passé toute une journée avec moi et m’a montré la collection de perlage, des dizaines d'œuvres perlées.

Mes ancêtres étaient parmi les familles qui ont formé le territoire métis. Les Métis sont bien reconnus comme des perleurs extraordinaires. Pour moi, voir une œuvre perlée comme ça, ça a créé de fortes émotions. Le sac à mousse m’a parlé directement.

Au fil des années, vous avez vécu dans plusieurs endroits. Qu’est-ce qui constitue le sentiment d’appartenance pour vous ?

J’ai grandi en Saskatchewan et vécu comme adulte à Montréal. Je vis maintenant à Victoria, à seulement vingt minutes de la mer. Je me trouve choyée !

Le sentiment d'appartenance, ça implique beaucoup de choses. C'est comme un arbre, ça prend des années pour se cultiver, pour se développer. Ça ne pousse pas vite non plus.

Je passe beaucoup de temps à marcher et à faire ce que mes ancêtres faisaient : passer du temps dehors. Les plantes et les animaux jouent un rôle important dans ma vie.

Des amitiés y contribuent aussi. Mais je pense que la COVID a changé tout ça parce que maintenant beaucoup de liens se construisent de manière virtuelle. Mais je préfère voir les gens face à face !

De quelle manière les Prairies influencent-elles votre art ?

On ne peut pas vraiment quitter les Prairies, elles sont toujours en nous. En tant que phytologue et artiste en arts visuels, ce que je fais est pleinement attaché à l'histoire des plaines.

Toutes mes œuvres parlent de l'histoire de ma famille. Mes ancêtres auraient été des perleurs extraordinaires, de façon traditionnelle. Moi, j’emploie la technologie pour en faire une version très contemporaine.

D’après vous, l’histoire renforce-t-elle le sentiment d’appartenance à un lieu ?

J'ai quitté la Saskatchewan pour aller à Montréal pour faire mes études en phytologie, mais aussi parce que je voulais apprendre le français, la première langue de ma mère.

Franchement, je ne me suis pas sentie la bienvenue au Québec. Je me suis trouvée plus immigrante que citoyenne. Mais une fois que j’ai appris le contexte historique de ma famille au Québec il y a 350 ans, cela m’a donné de la confiance, un sentiment d’importance, même d’appartenance.

Après 15 ans à Montréal, j'avais le goût de retracer l’histoire de mes ancêtres au Québec. Alors j’ai fait de la recherche, j’ai visité les archives.

Mes ancêtres étaient parmi les premiers colons à arriver en Nouvelle-France. Deux des 350 premiers colons qui sont arrivés en Nouvelle-France, en fait.

Une de mes ancêtres était la plus jeune, une Fille du roi. Les Filles du roi sont arrivées en Nouvelle-France afin de rencontrer des hommes français pour se marier. Elle est arrivée à l’âge de 13 ans et a habité à l’école fondée par Marguerite Bourgeois jusqu’à l’âge de 16 ans.

Votre méthode de perlage numérique est singulière. Comment la décririez-vous ?

Je voulais créer une grande histoire avec de petites œuvres. Et les perles sont très petites. Je voulais partager l’histoire métisse parce qu’elle est mal connue, surtout dans l’Est, en Ontario ou au Québec.

Je voulais perler en utilisant de vraies baies, alors j'ai fait une expérience qui a duré quatre mois… Et ça a été un échec : le résultat a été de la confiture sur ma table ! C’était assez décourageant.

Mais j’ai trouvé une autre manière de faire : je prends des photos des baies, j’utilise ces images comme des perles et je les organise comme je veux pour faire un dessin ou un collage.

Bien que j’utilise Photoshop, c’est toujours minutieux comme le vrai perlage, mais c'est fait à l'ordinateur.

Peut-on s’attendre à voir d’autres de vos œuvres dans l’avenir proche ?

Mon prochain projet sera exposé au musée Beaty Biodiversity de l’Université de la Colombie-Britannique à Vancouver en mai 2026.

Le projet explore des habitats qui ont appuyé les Métis dans les grandes plaines. J'espère que ça va être un projet interactif, même à distance.

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