Élections fédérales : des Fransaskois de Regina se confient sur leurs préoccupations

Kira Dereault

Qu’est-ce qui vous motive à aller voter ?

Pour moi, je veux voter pour un leader qui va former un gouvernement fort contre les États-Unis. J’aimerais que le Canada reste indépendant de ses influences.

Je voterai pour quelqu'un qui est capable d’affirmer qu’il ne touchera pas aux droits des femmes. Je crois que les femmes ont le droit de faire le choix sur ce qui impacte leur corps.

D’un point de vue économique, nous avons besoin d’un gouvernement avec un budget réaliste et un plan pour rendre le logement accessible. Je commence ma carrière universitaire et je crains que ce soit vraiment compliqué d’acheter une maison. 

Cette crainte de l’accès au logement est commune à d’autres amis de votre génération ?

Je dirais que oui. Ce n’est pas facile pour les jeunes de trouver un boulot, c’est même compliqué de trouver un stage ou un job d’été.

Je suis en première année universitaire mais je réfléchis à l’avenir. Avant, je voulais explorer le Canada, aller vivre autre part pour faire des expériences, mais en réfléchissant bien, le coût de la vie et du logement est tellement élevé dans d’autres villes ! Ça devient insensé de payer 4 000 ou 5 000 dollars pour un appartement à Vancouver…  

Qu’attendez-vous de l’avenir au Canada ?

Ce serait bien d’avoir une économie dans laquelle les jeunes Canadiens peuvent acheter une maison.

Puis, j’aimerais que le Canada garde ses valeurs de partage, de respect de l’autre, de bienveillance et de tolérance.

Le Canada est un pays où, historiquement, on respecte notre voisin et ses choix. Nous embrassons la différence car on est un pays d’immigrants, multiculturel. J’aime ce Canada.

Pensez-vous que la communauté francophone puisse jouer un rôle dans cet avenir ?

Je commence à voir la montée de valeurs très égoïstes dans mon groupe d’amis, comme “je veux être riche”, “je veux avoir du succès”, mais sans se préoccuper des autres. Ce sont des pensées autocentrées. Je pense que c’est le mauvais côté des réseaux sociaux qui provoque ça.

Heather Phipps

Quels sujets vous tiennent à cœur dans le cadre de ces élections ?

Tout d’abord, je dirais le respect des valeurs de tolérance et d’intégration qui nous caractérisent comme pays. Nous devons faire face aux discours qui essaient de semer la division.

Ensuite, j’aimerais voir l'éducation jouer un rôle important dans le développement d'une société juste, équitable et écologique. Il est très urgent que le gouvernement fasse des changements au niveau de l'environnement. Cette question est fondamentale. Le Canada doit être un exemple et montrer la voie en matière de lutte contre le changement climatique.

Êtes-vous optimiste sur ces questions ?

Oui, moi j'ai toujours de l'espoir et je pense que c'est important de le garder. On doit travailler ensemble pour avoir une meilleure société. Une société plus juste, équitable, inclusive et sécuritaire.

J'espère voir un Canada où tout le monde puisse vivre, avoir sa place, appartenir à une communauté, pas uniquement au niveau local mais aussi comme partie de quelque chose plus grand, car on fait partie d’un ensemble. Le Canada peut jouer un rôle dans la construction d’une citoyenneté mondiale. Cela comporte des droits mais aussi des responsabilités.

J’aimerais également voir une amélioration au niveau du transport public et de l'accessibilité en Saskatchewan. Certes, c’est une question locale mais cela montre que tous les niveaux de gouvernement peuvent avoir un impact dans l’amélioration de la qualité de vie des gens et de l’environnement.

Enfin, j’espère voir une augmentation du bilinguisme et du multilinguisme, et de la diversité des langues autochtones. Pour que toutes les personnes soient acceptées et entendues dans la société.

En parlant de bilinguisme, quelle place le fait français peut-il occuper dans ce monde dont vous parlez ?

Je suis ravie de faire partie de la communauté francophone dans le contexte minoritaire de la Saskatchewan. On voit de plus en plus de diversité dans cette communauté.

Moi, j'ai le plaisir de travailler avec beaucoup d'étudiants qui viennent d'ailleurs, qui sont immigrés au Canada pour travailler dans le domaine de l'éducation. Je pense que l'éducation en contexte minoritaire est très importante et il faut la soutenir. 

Anouk Roy-Melhoff

Quelles sont vos préoccupations principales en ce moment ?

J’ai un background dans le milieu des affaires et dans le secteur privé. Je suis sensible aux questions économiques, l’impact que peuvent avoir les tarifs dans les emplois, l’inflation et l’économie en général. Ce c’est qui me préoccupe le plus.

Une autre chose, c’est que l’influence des États-Unis est de plus en plus visible. Le capitalisme américain est différent de notre modèle et du modèle européen, où on voit un respect plus important pour les personnes et l’environnement.

Je crains que nous nous rapprochions du modèle plus consumériste. Au niveau des hommes politiques, les discours sont de plus en plus polarisants et extrémistes. On n’avait pas ça il y a dix ou quinze ans.

Qu’espérez-vous pour les prochaines années ?

Je suis toujours de nature positive. J’ai vécu à l’étranger plusieurs années et le Canada jouit d’une excellente réputation, nous sommes bien perçus à travers le monde. Nous sommes un pays accueillant, pacifique.

J’espère que tout ce qui se passe avec les États-Unis en ce moment va nous aider à nous solidifier. Ce mouvement patriotique que nous avons vu surgir ces derniers mois doit nous servir à nous différencier davantage des États-Unis.

Au niveau de la politique étrangère, nous avons toujours été un peu collés aux Américains, c’est le moment de nous détacher et de montrer notre voie. J’espère qu’on sera un acteur principal dans le concert des nations.

Nous sommes l’un des meilleurs pays au monde : nous avons des ressources naturelles et humaines, un bon niveau de développement, des institutions fiables. Dans la plupart des pays du monde, il n’y a pas de filet de sécurité au niveau de la santé, du chômage, etc. Nous avons les ingrédients du succès. En plus, avec de bonnes valeurs de tolérance et de liberté d’expression.

Dans quelle mesure pensez-vous que la communauté francophone puisse contribuer à l’épanouissement du Canada ?

Je suis dans la communauté depuis sept mois. Je découvre. Mais venant du Québec, je pense que c’est fantastique de me trouver dans un milieu professionnel francophone.

Comparativement au Québec, je trouve qu’ici il y a beaucoup d’associations qui travaillent très bien pour conserver le droit de parler en français, cultiver et promouvoir la langue. C’est vraiment bien. Ces associations ont un rôle important dans l’intégration des immigrants.

Moi-même, je suis allée voir l’association francophone de Regina et j’ai rencontré des gens ouverts et accueillants. Ça aide à tisser les liens sociaux.

Ces associations jouent aussi un rôle très important pour parler des Prairies aux autres communautés francophones du Canada. Malheureusement, dans l’est, nous ne parlons pas assez de la Saskatchewan, alors que c’est le grenier du Canada et même du monde ! Je pense qu’il y a un travail à faire connaître l’importance des Prairies sur le plan économique.

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