Après la victoire des libéraux, la Fransaskoisie reste prudente
Les élections fédérales ont mené à la formation d’un gouvernement minoritaire dirigé par le Parti libéral du Canada, sous la direction de Mark Carney. Un résultat qui suscite attentes et préoccupations chez les francophones en milieu minoritaire.
En Saskatchewan, la communauté fransaskoise accueille les résultats avec prudence, mais aussi avec l’espoir que les engagements en matière de langues officielles et de développement communautaire seront respectés.
Dans un communiqué publié le 30 avril, l’Assemblée communautaire fransaskoise (ACF) a félicité Mark Carney et le Parti libéral pour leur victoire.
L’ACF a exprimé sa volonté de poursuivre la collaboration avec le gouvernement fédéral, tout en rappelant l’importance des enjeux pour les communautés francophones en situation minoritaire.
« Le partenariat entre le gouvernement fédéral et la communauté fransaskoise est essentiel à la vitalité de notre langue et de notre culture en Saskatchewan », affirme Denis Simard, président de l’ACF.
L’organisme porte-parole souhaite notamment que les dossiers liés à l’éducation, l’immigration, la culture et la gouvernance communautaire demeurent prioritaires.
L’ACF a également salué le parcours de Jagmeet Singh, chef sortant du Nouveau Parti démocratique, pour son engagement envers la justice sociale et les groupes minoritaires.
La question des services en français
Lisette Marchildon, membre du conseil d’administration de l’Association communautaire fransaskoise de Regina (ACFR), partage cette volonté de collaboration, tout en soulignant certaines préoccupations.
« Je pense que ça va dépendre des différentes parties qui vont devoir travailler ensemble », observe-t-elle. La configuration minoritaire pourrait, selon elle, ralentir certains processus et complexifier la prise de décision.
« Si ça avait été un gouvernement majoritaire, ça aurait peut-être été plus direct. On aurait su à quoi s’attendre », indique-t-elle.
Toutefois, la Réginoise reconnaît que le contexte politique oblige à bâtir des consensus, ce qui peut aussi ouvrir la porte à un dialogue plus large avec les communautés.
Parmi les priorités évoquées, l’accès aux services en français demeure une préoccupation centrale.
Lisette Marchildon souligne que, malgré des améliorations, les francophones en Saskatchewan manquent encore de services adaptés à leur langue.
Elle insiste sur l’importance de la nouvelle mouture de la Loi sur les langues officielles, ainsi que sur le rôle de Radio-Canada, souvent perçu comme un pilier de la culture francophone.
Elle rappelle que les communautés comme celle de Regina, bien qu’importantes, doivent faire face à des défis logistiques pour maintenir les services et l’identité linguistique : « C’est difficile de tenir le coup, et de garder nos francophones. »
Cette réalité prévaut aussi en Alberta, au Manitoba ou en Colombie-Britannique, où les francophones sont minoritaires et souvent dispersés.
« Souvent, on n’a pas la masse critique pour que les services soient naturellement disponibles. Il faut se battre pour chaque ressource. »
Des préoccupations
Si l’immigration a fait l’objet de vives critiques durant la campagne, les programmes fédéraux permettent malgré tout de recruter des travailleurs francophones issus de pays comme la France, le Maroc ou certains pays d’Afrique francophone, constituant ainsi un pilier essentiel pour la vitalité de ces communautés.
« Ces programmes nous aident beaucoup à maintenir les services et à faire vivre nos associations », relève Lisette Marchildon.
L’accès à une main-d’œuvre qualifiée, en particulier dans les domaines communautaires et éducatifs, est présenté comme un enjeu stratégique dans les communautés francophones en milieu minoritaire pour les années à venir.
Autre point : la stabilité financière des organismes. Lisette Marchildon se souvient d’une période difficile dans les années 1990 où l’absence d’indexation des subventions avait sérieusement mis en péril les activités des associations.
« Pendant six ans, il n’y a pas eu d’augmentation. Plusieurs organismes ne pouvaient plus fonctionner », se remémore-t-elle.
Aujourd’hui, la communauté fransaskoise espère que le gouvernement Carney s’engagera à soutenir durablement les structures francophones, tant au niveau provincial que national.
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